CONCLUSION
Dans le chaos du cosmos, la vie subsiste en captant de l’ordre sur l’aile des vents. La mort est assurée, mais la vie devient possible en suivant des modèles qui mènent, comme des sentiers de sol plus ferme, à travers les marécages du temps. Les cycles de lumière et d’obscurité, de chaleur et de froid, de magnétisme, de radioactivité, de gravité, fournissent tous les guides nécessaires à la vie, et la vie apprend à réagir à leurs signaux les plus infimes. L’éclosion d’une drosophile s’accorde à une étincelle d’un millième de seconde ; la reproduction d’un ver velu se trouve coordonnée, au fond de l’océan, par une lueur de clarté que réfléchit la Lune ; le développement des œufs de caille est synchronisé par une conversation chuchotée entre les embryons ; la conception, chez une femme, attend la phase lunaire sous laquelle elle naquit. Rien n’advient dans l’isolement. Nous respirons et saignons, rions et pleurons, nous effondrons et mourons au rythme de stimuli cosmiques.
La matière inorganique s’est assemblée comme il fallait pour créer un organisme se perpétuant lui-même, lequel mit en marche un système de transformations qui a maintenant produit un dispositif de plusieurs millions de pièces. C’est la Surnature, et l’homme se trouve assis au centre de sa toile, tirant sur les fils qui l’intéressent, en suivant certains jusqu’au bout vers des conclusions utiles, en brisant d’autres dans son impatience. L’homme constitue le fer de lance de l’évolution, vital, créateur, immensément doué mais encore assez jeune pour causer des ravages dans le premier élan de son enthousiasme. Il faut souhaiter que cette période d’adolescence maladroite touche à sa fin, à mesure que l’homme commence à se rendre compte qu’il se trouve dans l’impossibilité de survivre seul, que le réseau de la Surnature est soutenu par les forces combinées d’un grand nombre de fragments individuellement fragiles, que la vie sur terre est unie en ce qui équivaut à un super-organisme unique, et qu’à son tour ce dernier ne représente qu’une partie de la communauté cosmique.
À première vue, le processus évolutif a l’air extrêmement gaspilleur, avec la course de la plupart de ses variantes vers les culs-de-sac de l’extinction ; cependant, jusque dans leurs échecs, ces variantes apportent quelque chose aux quelques espèces qui, elles, réussissent. Il est impératif qu’il existe une multitude de participants pour que la vie se puisse mouvoir sur un large front, essayant toutes les possibilités dans sa quête des possibilités efficaces. Même ceux qui meurent n’ont pas vécu en vain, étant donné que la nouvelle de leur échec se trouve diffusée et devient partie intégrante de l’héritage de la Surnature. Cette communion se révèle possible parce. que la vie partage une sensibilité commune au cosmos, possède une origine commune et parle le même langage organique.
L’alphabet en est écrit en des symboles chimiques partagés par tout protoplasme. Le mot le plus commun, c’est l’eau, laquelle possède la propriété d’instabilité qui fait d’elle, pour les plus infimes signaux, un récepteur des plus sensibles et des plus sûrs. Des formules simples, dans une solution aqueuse, permettent à l’information de passer de cellule en cellule tant qu’il existe un contact direct entre elles. La même information peut bondir à travers l’espace doté d’une imbrication de champs électriques, ou bien là où deux informateurs sont assez pareils pour résonner en sympathie réciproque. Et aux niveaux les plus élevés, des messages sont portés à travers des espaces temporels.
En tête de l’évolution vient une variante qui se limite à quelques espèces et qui paraît ne jouer aucun rôle pour les rendre mieux adaptées en vue de la survivance dans le système. La biologie est généralement très parcimonieuse et entièrement utilitaire ; toutefois, les hommes – et peut-être les chimpanzés et les dauphins – ont acquis un besoin de choses qui ne satisfont aucun des appétits normaux, naturels. Nous nous sommes dotés du goût du mystère. Nous sommes devenus conscients de nous-mêmes, de notre vie et du fait que nous devons mourir. Nous avons ouvert une porte sur la prévoyance, l’imagination et, par la même occasion, découvert l’angoisse. Le fait que même une plante en pot réagisse à la mort d’un animal proche signifie que la vie a toujours connu le phénomène de la mort ; mais avec la conscience arrive une perception plus complète de notre relation à cet état – du fait que nous pouvons le provoquer, ou l’empêcher, ou, en essayant de l’empêcher, aller jusqu’à provoquer notre propre mort. Et avec ce genre de conscience viennent la culpabilité, le conflit et le développement d’une barrière mentale derrière quoi nous pouvons nous cacher certaines choses à nous-mêmes.
En termes biologiques, l’origine de cette nouvelle perception reste encore obscure ; nous commençons toutefois de nous faire une certaine idée de ses implications. L’évolution cosmique a produit notre système solaire et notre planète habitable ; l’évolution inorganique a réuni les ingrédients nécessaires à la production de la vie ; l’évolution organique a façonné, modelé cette vie en son kaléidoscope de formes ; l’évolution culturelle a pris un groupe unique et l’a poussé rapidement, grâce à l’intelligence et à la conscience, jusqu’à une position où il put manipuler à son profit le reste de l’évolution. Nous voici donc parvenus à l’heure de la maîtrise, avec la conscience nouvelle et grandissante, à la fois de l’énormité de la tâche et des dimensions de notre propre aptitude à l’affronter. Dans cette situation deux choses se détachent sur toutes les autres : l’une est que notre plus grande force réside en l’unité avec la totalité de la Surnature ici-bas, et l’autre que cette unité pourrait nous donner l’élan dont nous avons besoin pour transcender tout à fait le système.
La Surnature pourrait devenir quelque chose de véritablement surnaturel.
FIN
[1] - L'anglais ne dispose que d'un seul mot (day) pour exprimer ces deux notions.
[2] - Lire dans la même collection La lune clé de la Bible par Jean Sendy, A 208 *.
[3] - Lire dans la même collection Le dossier des influences cosmiques par Michel Gauquelin, A 314
[4] - Lire dans la même collection Vers un retour aux étoiles, par Erich von Däniken, A 322 **.
[5] - Lire dans la même collection : L'énigme du zodiaque, par Jacques Sadoul, A 299 **.
[6] - Lire Le secret de la Grande Pyramide, par Georges Barbarin, A 216 *.
[7] - Lire dans la même collections Les maisons hantées, par Camille Flammarion, A 247 ***.
[8] - Lire dans la même collection Le grand art de l'alchimie, par Jacques Sadoul, A 329 *.
[9] - Playing possum : expression américaine signifiant « se tenir coi », « éviter de se faire remarquer ».
[10] - Lire dans la même collection L'hypnose et les phénomènes psi, par Dominique Webb, A 348 **.
[11] - Lire dans la même collection D'où me viennent ces pouvoirs ? par Matthew Manning, A 341 **.
[12] - Lire dans la même collection Les mystiques orientales par Odier et Smedt, A 338 ***.
[13] - Aux États-Unis, Central Intelligence Agency = Deuxième Bureau. (Note du traducteur.)
[14] - Lire Vie et mœurs des abeilles par Karl von Frisch, J'ai Lu, D 34 **.
[15] - Bénévoles s'occupant d'aide sociale.
[16] - Lire dans la même collection Les esclaves du diable, par Georges Demaix, À 262**.
[17] - Lire dans la même collection La troisième oreille par Belline, A 342 **.